L’année des pierres de Rachel Corenblit

L’année des pierres, Rachel Corenblit
Casterman 2019, Coll. Ici/maintenant dirigée par Vincent Vuilleminot.

Dix adolescents français mal dans leur peau, envoyés de force par leurs parents ou volontaires, partent étudier un an au lycée français de Jérusalem. Ils sont à l’internat,  en seconde.

Daniel, le narrateur semble nonchalant et passif mais rien ne lui échappe,

Avec lui, Christophe, son compagnon de chambre veut se faire appeler Samson pour être plus juif, les jumelles Anna et Anaïs, Sonia, Benjamin, Rose et la lumineuse Lucille que son frère a précédé en tant que soldat de Tsahal

La quatrième de couverture est géniale et donne une idée de la complexité de ce roman

« Ce n’est pas parce qu’on est paumés loin de chez nous qu’on se ressemble

Ce n’est parce qu’on devient amis que les choses seront plus simples

Ce n’est pas parce qu’ils nous prennent pour cibles qu’ils sont nos ennemis

Ce n’est pas parce qu’on est montés dans ce bus qu’on redescendra indemnes »

Ce roman est en effet remarquable

  • par la narration qui va et vient dans le passé de chaque jeune pour nous expliquer son parcours et chaque raison différente de se retrouver là, dans le futur de leur vie d’adulte ils se reverront ou pas, dans le temps de leur vie à Jérusalem et dans le temps de l’attaque de bus, temps dilaté car c’est là que tout se joue
  • par la richesse des vies de ces ado, ils s’aiment, se fuient, se détestent, sont riches ou pauvres, croyants ou pas…
  • par l’événement qui bouleverse leur vie, leur présent mais aussi la relation qu’ils avaient avec leur passé et leur famille

 

Le roman s’ouvre par une attaque de pierres qui s’abat sur le bus scolaire qui les emmène en voyage culturel. Le chauffeur est tué, l’accompagnateur blessé, les élèves terrifiés. Mais coup de théâtre,  l’armée intervient et arrête tous les lanceurs de pierres, c’est lé début de l’intifada, la guerre des pierres de 1987.

On revient alors par de longs flash back sur l’arrivée des jeunes, leur rencontre et la formation d’une amitié très profonde. « Tous les dix, nous sommes liés, rien ne peut nous briser »

Puis retour à l’attaque, l’armée place les hommes du village en ligne et fait défiler les jeunes du car, un par un, pour qu’ils désignent ceux qui ont lancé les pierres

Certains le font avec rage et haine, d’autres s‘y refusent car ça leur rappelle des histoires qu’ont racontées les grands parents des histoires de dénonciation qui les ont envoyé à la mort.

On a aussi une autre intrigue, Daniel retrouve à Jérusalem son grand-père Daniel qu’il ne connaît pas dont sa mère ne lui a jamais parlé, il faudra attendre la fin du récit pour découvrir une vérité effroyable, qui a un lien avec l’affaire du bus

Au début, je trouvais le roman un peu trop univoque, un peu pro juifs, mais peu à peu, l’équilibre se fait Grace à Daniel qui a un regard juste et intelligent.

C’est un roman d’ados parce qu’ils en sont les personnages principaux mais sa richesse et sa complexité sont d’une profondeur sans âge.

 

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