calendrier 2024

15 Février, rencontre autour de Pars! Travaille! La rumeur libre, 2014, à l’Alliance Française d’Auckland

12, 13 mars, Moulins, à l’invitation de l’ARALL , animation de deux ateliers autour de l’écriture de formes brèves, aux journées PREAC.

17, 18 mars salon Magnifique livre, Chapelle de la trinité, Lyon.

23, 24 mars, Salon du livre de Nantua.

12 juin, A l’invitation de Christian Chavassieux, Rencontres de la Boisserie, Charlieu

24, 25 août, Valselivres, à Leleix. Lecture musicale avec Maya, samedi 24 et dimanche 25 à 16H Pars, traverse les montagnes!

12 octobre, animation stage lecture à voix haute, le caveau des lettres, MJC de Chaponost

30/11 Festival Gratte-Monde, Grenoble, à l’invitation de la Maison de la Poésie Rhône-Alpes, atelier d’écriture, table-ronde et lecture

Festival cinéroman, 2023

J’aurai la chance de présenter les romans, d’animer les débats, et la plus grande chance, celle de rencontrer, en vrai, Catherine Poulain, et même de l’interviewer, et aussi de manger à côté d’elle et d’entendre sa voix douce, ses rêves, ses projets.

Frapper l’épopée, Alice Zeniter, Flammarion, 2024

Une jeune femme, Tass, professeur de français née en Nouvelle-Calédonie, revient s’y installer définitivement et y enseigner.  Elle s’interroge sur sa place, son identité, son avenir, parce qu’elle vient de quitter Thomas son copain français.

 Dans sa classe, elle remarque deux jumeaux Kanach, elle est frappée par leur intelligence et leur calme.  Et un jour, ils disparaissent.

 Parallèlement à la vie de cette jeune professeur Tass, on entre dans la vie d’un groupe très original de trois personnes, deux femmes et un homme qui tentent une nouvelle forme de militantisme indépendantiste « l’empathie violente ». Il s’agit de faire réagir les blancs par petites touches, de leur faire peur.

Tass, alias Alice Zeniter, retrouve dans un accident en pleine forêt, dans un long rêve halluciné, l’histoire de ses ancêtres Kabyles venus là comme bagnards et retrace avec une grande virtuosité toute l’histoire du peuplement de l’île, des bagnards, de leur reconversion en paysans concessionnaires. Là, on comprend mieux ce qu’elle est allée faire là-bas !!!  Elle retrouve les hiérarchies entre les différentes libertés, les différents hommes libres, les blancs, les blancs-blancs, les zoreilles, les asiatiques.  Elle explique l’idéologie colonialiste, qu’elle soit saint-simonienne ou juste capitaliste.  C’est un cours d’histoire magistrale, jamais ennuyeux.  Nous sommes frappés par la violence de la répression.  Au début, les Canaques ont laissé s’installer les blancs et ensuite, quand ils les ont vus agir, ils se sont rebellés et ont été massacrés. J’ai noté, comme chez les Aborigènes, une relation très particulière à leur terre, leur terre est aussi leur nom, le nom de leurs lignées, de leur histoire.

 Mais ce n’est pas un cours d’histoire, c’est un roman plein de péripéties, plein de magie, d’immersion dans la nature, on s’attache aux personnages, aux trois farfelus, aux amis de Tass, aux jumeaux surtout, et à leur tragédie.

 C’est brillant.

 Une réserve cependant, la façon dont est amené le passé des ancêtres de la narratrice, de ses ancêtres kabyles arrivés là comme bagnards parce qu’ils ont lutté contre la France m’a paru un peu légère, l’espèce de long rêve halluciné de la narratrice est plausible dans l’univers kanak, mais un peu facile sur le plan romanesque.

Fantastique histoire d’amour, Sophie Divry,

Fantastique histoire d’amour, Sophie Divry,

J’ai été impressionnée par la profondeur, l’originalité et la virtuosité de ce nouveau roman de Sophie Divry.

 Deux personnages paumés, en recherche d’amour, très attachants nous sont présentés :  un inspecteur du travail, Bastien, tenace, courageux, mais décontenancé par le départ de sa femme et ne s’en remettant pas vraiment.

 Une jeune journaliste scientifique, Maïa qui cherche l’oubli dans les bras de passage trouvés sur Tinder parce qu’elle a peur d’aimer.

 Le personnage féminin, Maïa, se bat avec sa peur d’aimer, la douleur de de la perte de sa mère, le poids de son père veuf à qui elle doit rendre visite et avec les rapaces du monde du journalisme.

Lui, Bastien, doit se battre contre les patrons qui ont une bonne raison de mettre leurs employés en danger et toujours une bonne excuse quand ils ont des accidents du travail. Il se bat contre la justice qui in fine, prend toujours leur parti.  Il se bat aussi contre sa dépression réactionnelle après le départ de sa femme et contre un pessimisme existentiel. Il n’a qu’un espoir, une lueur, il est catholique, et la messe le réconforte, et puis il a quelques amis qui le comprennent et le soutiennent indéfectiblement. 

Ces deux-là vont vivre des aventures et des épreuves terribles. Ils vont mener chacun leur enquête jusqu’à ce qu’elles se rejoignent et qu’ils se rencontrent.   Sophie Divry joue avec les codes du roman d’amour, du roman d’aventures et du thriller scientifique sans pour autant négliger ses personnages.

Lui est appelé sur les lieux d’un accident du travail mortel, une compacteuse a broyé le corps d’un ouvrier descendu à l’intérieur.  Cette mort est le début d’une recherche : la police pense qu’il s’agit d’un meurtre, l’inspecteur pense qu’il s’agit d’un accident, car il sait comme les patrons ne respectent jamais ou très mal les règles de sécurité.

 Elle se rend au CERN, (Centre européen de recherche nucléaire) pour une enquête journalistique ; elle espère être aidée par sa tante, Victoire, éminente scientifique. Mais sa tante n’est pas dans son état habituel, elle lui raconte une histoire de cristaux qui a mal tourné, en effet, les cristaux sont devenus une drogue surpuissante.

 Ensuite, il est difficile de résumer l’ensemble des rebondissements, découvertes, aventures, meurtres qui font de ce roman un thriller passionnant. Mais c’est aussi un tableau passionnant de la société contemporaine, de ces solitudes urbaines, de ces outrances sexuelles, de ses addictions, sexe, alcool et drogue, de son appât du gain. C’est enfin un roman scientifique qui nous fait découvrir le caractère singulier du CERN, de ses recherches, qui nous explique avec autant de clarté et d’intelligence les arcanes du code du travail que celles de la finance ou encore celles de la fusion des cristaux, sans jamais nous ennuyer.

Un détail supplémentaire, pour nous, habitants de la région lyonnaise, c’est amusant de retrouver tous les lieux, les rues, les parcs, les quartiers de Lyon et les paysages du Bugey. J’adore la description du village l’hiver.

Cartographie d’un feu, Nathalie Démoulin, Denoël, 2024.

Grâce à Arno Bertina, j’ai lu Cartographie d’un feu de Nathalie Démoulin, qui vient d’être publié chez Denoël.

Une cluse jurassienne aux parois abruptes et noires d’épicéas et de roches, des pentes vertigineuses en hiver et la neige elle aussi devenue noire parce qu’un feu se propage.  Pourquoi ce feu ?  S’est-il développé sur des poches de pétrole inconnues ?  Pourquoi la Terre brûle-t-elle en hiver ?  En tout cas dans ce décor halluciné et dantesque, les hommes luttent.

 Le narrateur et sa compagne Carole se réfugient dans une maison de famille isolée.  Cette maison de famille est habitée et hantée par les fantômes et les vivants.  Le patriarche Jason, présent et absent, ancien capitaine d’industrie devenu peintre, avait déjà perdu une première femme et deux enfants dans un incendie, il y a longtemps.  Désormais, il veille sur le dernier fils, fou qui se balade au bord du lac, avec des bois de cerf sur la tête.  Il tente d’oublier sa deuxième épouse, une marathonienne qui a formé à la course et au saut à ski leur fils avant de disparaitre.

 Mais on ne s’envole pas hors de cette cluse, on y reste, comme frappé de stupeur, ou on y meurt.

 En effet, le feu ne s’éteint pas et provoque d’autres morts.  Un maire, autour de qui tout s’écroule, se suicide, oubliant ainsi la dette qu’il a accumulée pour sa ville.

Et au milieu du cercle de l’enfer, un lac opaque, noir qui attire et peut noyer.

 L’écriture de Nathalie Démoulin est précise, elle excelle à créer des images puissantes et envoutantes, pour décrire la montagne, la neige, la cluse, le feu, les maisons pleines de tapis, de tapisseries, et de tableaux, les hommes et les femmes affublés de tenues bizarres, tout est brûlant de couleurs. On y retrouve un des thèmes très original de Bâtisseurs de l’oubli, celui du capitaine d’industrie, dont la puissance n’apaise pas la mélancolie.

 Et on ne sait plus près de quelles frontières elle nous entraîne, on confond réalité et cauchemars, souvenirs et faits présents, réapparitions et disparitions, fuites ou morts.

Pas d’équerre, Judith Wiart, Editions Louise Bottu, 2023

« Pas d’équerre », une expression de maçon comme titre pour  un livre inclassable, carnet de bord, témoignage, poèmes, déclaration d’amour aux élèves, collages de circulaires et  d’extraits de manuel, extraits d’atelier d’écriture, scénettes enlevées,  drôles, tranches de vie,  constat d’échec dans un LEP,  avec des élèves en CAP de maçonnerie qui n’ont pas choisi, qui sont là, par hasard, qui attendent… fatigués si fatigués « leur fatigue me mine, leur corps avachis sur la table qui n’est plus une table de travail. »   Des élèves dans « des salles aux radiateurs béants, aux trous dans le plafond »

 Manque de profs, manque de moyens pour rénover mais de l’argent pour installer les portiques de sécurité et distiller la peur.

 Au milieu de ce désastre, l’enseignante tient la barre parce qu’elle s’intéresse à ses élèves, à chacun d’eux, elle aime les faire écrire, faire jaillir leurs mots, comme des talismans contre le malheur.

Et elle aime écrire sur eux, grâce à eux, sur leur monde « pas d’équerre », mais riche d’humanité. 

L’ombre d’un grand oiseau, Catherine Poulain, Arthaud, 2023

L’ombre d’un grand oiseau, Catherine Poulain Arthaud 2023

 Pour les amoureux du grand marin, ce livre est encore un cadeau.  Catherine Poulain retirée aujourd’hui dans le Médoc raconte les bêtes, toutes les bêtes qu’elle a rencontrées de l’enfance au cœur de la nature, à sa longue vie de voyageuse et d’aventurière.

 Elle raconte la petite fauconne borgne qu’elle avait recueillie, les poissons qu’elle péchait et dont elle mangeait le cœur, les grands fauves tristes.

 En chaque animal, elle retrouve son humanité et également sa sauvagerie, elle souhaite toujours les rejoindre, les soigner, les accompagner, se fondre en eux qui sont, pour elle, plus que des frères, des semblables.

  » Je suis hors d’haleine, bête en course, qui brise mon élan me blesse, qui l’arrête le mutile, qui me retient la chèvre, qui m’enferme me tue, je suis animal, tout est animal en moi dévoyé. »

Récits en chantier seizième

Pour la seizième rencontre de Récits en chantier, nous recevrons pour la deuxième fois Nicolas Pineau autour de son recueil encore inédit Le Petit invité. Entre prose et poésie, il y sera question d’attente, de naissance, d’enfance, de dénuement et de perte de souvenirs.

Et surtout de l’amour fou d’un père pour son fils. Et, tout sera dit en simplicité et en émerveillement.

Nicolas sera présenté par Patrick Laupin.

Nous les accueillerons le jeudi 12 octobre à 19 h à la Galerie JL Mandon, 3 rue Vaubecour, Lyon 2°.

Elmone Treppoz, Maryse  Vuillermet