La singularité de l’écrivain, d’après Charles Juliet

Lumières d’automne Charles Juliet journal VI 1993 1996

bourgogne , suisse et burkina fasso 004P 85 « Claude Duneton, il est à sa table dix heures par jour. J’avoue qu’il m’a rendu honteux moi qui ne peux écrire que le temps d’une courte après-midi

Avoir un son pour un musicien de jazz, c’est avoir un son qui n’appartient qu’à lui. Un son où passe l’essence de sa personnalité, et qu’on peut très vite identifier. Pour l’écrivain, il se pose le même problème. Sa singularité doit infuser les mots qu’il emploie, façonner sa langue, son style. Tant qu’une écriture  ne porte pas le sceau d’une singularité, elle reste impersonnelle et tout ce qu’elle véhicule s’en trouve banalisé, appauvri »

NDLA  Je crains que ce soit mon cas

Les livres avec lesquels, j’ai vécu une forte rencontre ils sont là sur mes rayons près de ma table à portée de main, et de temsp à autre, j’en prends un et en lis deux ou trois pages

P 125 Je voudrais dire maintenant ce qu’on aura peine à croire : quand je publie un livre, je m’en détache aussitôt et je ne me préoccupe pas de savoir ce qu’il devient. S’il a une certaine valeur s’il porte en lui une suffisante énergie, je suppose qu’il trouvera les lecteurs qu’il peut intéresser. Mais si cette valeur et cette énergie lui font défaut, il va de soi qu’il sombrera dans l‘oubli et qu’il n’y aura pas ç le déplorer. On comprendra donc que je n’ai pas besoin de recevoir des éloges et que je ne suis pas atteint par la critique si sévère soit-elle. Je précise aussitôt qu’il n’y a aucun orgueil dans ma position. En fait, l’essentiel se joue au long des heures de travail, quand je creuse  ma substance pour y chercher les mots qui rendront au plus judet ce que je veux dire. En obéissant à la nécessité que je subis, je suis en plein accord avec moi-même et ce qui est d’une extrême importance, et sur cet accord, nul ne peut jeter une ombre.

Ecrire est un acte grave. J’écris donc avec une sincérité et l’honnêteté dont je suis capable. Le texte une fois publié si on lui reconnaît des qualités, je n’ai pas en tirer avantage. J’ai simplement écrit ce que j’étais contraint d’écrire. Dès lors, je n’ai pas à attendre de compliments. A l’inverse, si on estime que ce texte est dépourvu d’intérêt et que ce serait perdre son temps que de le lire, alors, je n’ai rien à répondre. Il n’en demeure pas moins que j’ai la conscience tranquille de l’artisan qui n’a rien à se reprocher. Je ne peux ni faire mieux ni faire autre chose.