Reviens Ulysse!

odyssee1J’ai relu le retour d’Ulysse. En ce moment, je suis obs?d?e par les retours. Notre?lecture?au jardin a port? sur ce th?me, retour de voyage, retour d’exil, retour dans sa famille, je viens de lire La terre des mensonges, c’est encore l’histoire d’un retour ? la ferme des anc?tres.

Donc quand Ulysse ?rentre, ?pas d’embrassades, mais des ruses, des regards, P?n?lope assise, l’observe, la nourrice qui lave ses pieds le reconnait mais doit se taire, c’est un retour presque triste, lourd, vengeance, ?tueries, accusations, explications, avant les effusions, il faut?r?gler?ses comptes, reprendre sa place, toujours se battre, rien n’est donn?, ?les servantes pendues ? la corde d’un navire sont une image horrible de cruaut?, comme des colombes aux ailes d?ploy?es, ?dit le texte.

Des images me restent, le grand lit construit autour d’un tronc d’olivier, l’arc et les fl?ches qui transpercent les cous des pr?tendants, le mendiant Ulysse assis sur son tr?pied qu’on agonise d’insultes et de brimades, les festins de viande.

J’ai soudain envie de maisons vides, de tapis, de?m?tiers?? tisser, d’odeurs de ?suint et d’huile d’olive, d’?les grecques et de M?diterran?e et je pense que la Gr?ce?antique??tait plus proche de l’Alg?rie des ann?es 80 que j’ai connue.

La M?diterran?e et ses hommes d religion et de pens?e. Tous ses dieux grecs, ?ces Dieux vivants et leurs?chamailleries?tr?s humaines, leurs coucheries, leurs discussions, ?leurs palabres, leurs?enfants?ill?gitimes ?que je trouvais ridicules?quand?j’?tudiais le grec me plaisent infiniment ?plus?d?sormais que les dieux?uniques, parfaits, inhumains ?et s?v?res de la chr?tient? et de l’Islam. ?Je regrette ce fouillis de dieux demi-dieux demi-d?esses, hommes presque dieux, dieux presqu’hommes de la Gr?ce Antique.

Soleil levant

Le Bain du SoleilAucun homme n’est oc?an

Aucune mer n’est oc?an

Le petit merle a vol?

Le jour ne se l?ve pas assez t?t

Les voitures au loin ?d?chirent le bitume de la nuit

Toute ?vie est assassine

Fra?cheur?amie et consolante

Mais o? sont parties les m?sanges?

Elles ?taient si proches et si vivantes,

O? est mon p?re?

Il manque tant ? son jardin

Tableau Le bain du soleil de Marie-Blanche Bayon-Ducret

En vases communicants avec Gilles Bertin

J’ai invit? Gilles Bertin ? un vase communicant en juillet. Nous avons choisi en commun une photo. Elle ?s’intitule

An

J’ai invit? Gilles Bertin ? un vase communicant en juillet. Nous avons choisi en commun une photo. Elle ?s’intitule

Antho et Momo, Friche industrielle de Vaulx-en-Velin ? Mathieu Neuville

… Mon ?texte s’intitule chez Gilles Wart et le ?voici le sien.

Le Choix de Witold

Witold Heleniak grenouille dans la finance japonaise. Il est arriv? voici une heure par le vol direct Tokyo Varsovie. Un h?licopt?re l’attendait sur le tarmac, il l’a amen? ici, ? cent vingt kilom?tres au sud, dans la friche industrielle Kozlowski de ??d?. Des dizaines de grandes halles aux murs de briques coiff?es de charpentes m?talliques, aux dalles de b?ton jonch?es de d?bris de vitres tomb?es des verri?res, de ballots de tissus ?visc?r?s, de palettes bris?es. Depuis la chute du rideau de fer tout a chang?, en pire, en mieux, en autre chose. Witold avait une dizaine d’ann?es, comme moi, il ne se souvient de rien de pr?cis, seulement d’un d?sastre magnifique, d’un espoir terrifiant, la travers?e d’un cerceau enflamm?, la pulsation pr?cipit?e du temps, tout cela m?l? en un magma bruyant, ?clatant… personne ne nous expliquait rien, la libert? ne s’explique pas, on est jet? dedans sans bou?e et on se d?brouille ou on coule, ses parents avaient assez surnag? pour lui assurer de bonnes ?tudes ? l’universit? de ??d?, en math?matiques. Witold est brillant, une fondation am?ricaine lui a pay? une bourse, il s’est sp?cialis? en mod?lisation financi?re. La Bank of Japan ?? la BoJ par les japonais et les financiers de toute la plan?te ? lui a propos? un job avant m?me l’obtention de son dipl?me, il nous a quitt?es toutes deux, moi et ??d?. Il n’?tait jamais revenu depuis.

L’h?licopt?re le d?pose devant l’un des b?timents que rien ne distingue des autres, hormis cette fresque en fa?ade repr?sentant une Lolita de BD dot?e d’immenses yeux verts et, en haut de son pignon, une mosa?que compos?e de carreaux de fa?ence bleu nuit?:

ATELIER K

TEATR LOGOS

L’h?licopt?re red?colle, couchant de ses pales les touffes d’herbes folles? entre les fissures des dalles. Witold p?n?tre dans l’Atelier K. Il ressort presqu’aussit?t, portant des chaises et, accroch?e ? son coude,?notre table, cette petite table basse au pourtour d?cor? d’arabesques en fer forg? o? nous buvions des ?ywiec apr?s les r?p?titions. Il s’installe. Allume une cigarette. Une autre. Plusieurs. Une ribambelle.

Witold attend.

Il m’attend, moi.

Il a fini son paquet, il le froisse, le jette par terre (? Tokyo, il ne fait pas ?a?!), fouille dans sa veste, sort un paquet neuf, le consid?re, rassur? d’avoir assez de munitions pour attendre.

Il m’a aim?e d?sesp?r?ment, intens?ment, fabuleusement, il m’aime toujours. Pour quelle autre raison serait-il ici??

Il change de position sur sa chaise, mais ?vite de regarder la fresque.?Sa fresque. Mon portrait qu’il a peint lui-m?me. Il est ? c?t? depuis qu’il est arriv? mais se comporte comme si elle n’existait pas. Comme s’il avait peur de moi.

Une fauvette zinzinule. Il la cherche . ?Se l?ve avec des gestes prudents, s’avance vers le bosquet d’acacias au coin de l’atelier. Elle d?roule les cr?celles de ses strophes courtes en crescendos de gazouillis. C’est une oiselle aux tons gris olive et blanc cass?, toute petite chose bouleversante, ardente, fervente, tout le chant du monde.

La fauvette, il ne la verra pas, pas plus qu’il ne me verra. Toutes deux, nous n’existons que dans ses souvenirs, nulle part ailleurs, plus pr?sentes que si nous ?tions l?, devant lui, en chair et en os.

1992, une soir?e de juin. Witold porte une salopette de cheminot trop grande. Elle a appartenu ? son p?re. Un parfum de miel embaume l’air. Les jeunes acacias ont pouss? dans la zone industrielle d?sert?e. Le Teatr Logos s’est s’install? dans l’atelier K voici quelques mois. Nous sommes assis devant cette m?me table, elle est couverte d’un pique-nique que nous ne mangeons pas. Depuis des semaines, chaque soir, il me rejoint ici ? la fin de mes r?p?titions et nous parlons longuement, bien apr?s la tomb?e de la nuit.

Le m?me chagrin qu’alors l’emplit, je le devine. Un voile qui s’?tire du Japon jusqu’ici, dans le vieux c?ur de la Pologne. Une gaze de sensations et d’?motions qui remontent, ??a mood?? comme disent les am?ricains, la madeleine de l’?crivain Marcel Proust. Il se mord l’int?rieur des joues. Il croquait ma bouche, poussait sa langue en moi, nos salives se m?laient dans le m?me fluide chaud et liquide qui coulait de nos l?vres dans nos gorges et nos nuques. Nos bras tremblaient de fatigue nerveuse, nous avions froid alors que juin de cette ann?e-l? ?tait br?lant. Cette humidit?, ce tremblement, il les a encore en lui aujourd’hui. La douleur ?tait ? vif. Nous avions commenc? ? nous aimer mais, aussit?t?!, cela s’arr?tait. ? cause de lui?! Il voulait tout. Partir au Japon et que je parte avec lui, loin de ??d?, de l’Atelier K et du Teatr Logos o? je d?butais, il voulait que nous nous mettions dans la m?me valise, et que nous nous transportions l?-bas avec notre amour. S’il avait pu ajouter ??d?? dans la valise, il l’aurait fait. Nous arrachions le papier peint de nos murs. Des lambeaux, des aigrettes restaient par ci, des pans entiers par l?, le sol ?tait couvert de billets d’amour ? l’encre d?lav?e par nos pleurs. Dessous, derri?re, il y avait ??d?, nos familles, nos amis, les usines vides?; il y avait la place vacante pour de nouveaux mondes, l’avenir, la BoJ, le Teatr Logos. Nous devions nous s?parer, la d?cision avait ?t? prise bien avant ces soirs d’?t?, lorsque j’?tais venue ici pour la premi?re fois, friche industrielle Kozlowski, atelier K, pousser la porte du Teatr Logos, lorsque Witold avait eu au t?l?phone un chasseur de t?te de?la BoJ. Mais Witold ne devinait pas qu’il avait choisi bien avant nos disputes. Il savait les ?quations, les th?ories, les mod?les. Il ne savait pas le choix. Il ne savait pas partir. Quitter ??d?. Me quitter.

Ce soir, vingt ans plus tard exactement, la troupe du Teatr Logos ne viendra pas r?p?ter ? l’Atelier K. Witold peut attendre, il n’y aura plus de motos qui remonteront l’all?e, passeront entre les b?timents abandonn?s, s’arr?teront devant, des casque ?t?s lib?rant des chevelures de gar?ons et de filles de notre ?ge. L’Atelier K est vide, le Teatr Logos s’est install? dans un b?timent de pierre au centre ville.

Witold n’a pas r?ussi ? voir la fauvette, il retourne s’asseoir. Sort un carnet de sa veste. Un crayon. Ainsi donc, il dessine toujours?!… Je souris en moi-m?me, rassur?e, presqu’attendrie, tout ne serait pas perdu, il n’est pas enti?rement acquis au monde de la finance, quelque chose d’avant est rest? en lui. Il tourne la t?te vers la fresque, me regarde…

Ses yeux fixent les miens…

Enfin?!

Sa main descend vers son carnet, trace un premier trait… un autre… Ses yeux dans mes yeux, il me dessine. Ses gestes sont le chant de la fauvette.

Antho-et-Momo

Antho et Momo, Friche industrielle de Vaulx-en-Velin ? Mathieu Neuville

Tristesse. Witold n’aurait pas d? revenir. Je suis une illusion, une fresque, un remords, un soir d’?t?, je suis ??d?, la fin de l’enfance, un tricot d’odeurs de cheveux, la neige des hivers, les grincements des tramway avenue Ko?ciuszki, les r?pliques des r?p?titions r?sonnant dans l’Atelier K, je suis la premi?re fois, la seule qui jamais ne renaisse, quelque chose de tellement plus complexe et tenace que les syst?mes financiers auxquels Witold consacre sa vie depuis des ann?es.

La nuit tombe. Deux phares grossissent dans l’all?e entre les b?timents de la friche. Un instant, il peut se donner l’illusion qu’il s’agit d’amis qui viennent nous rejoindre. Nous boirons des bi?res et nous fumerons, tout ? l’heure nous repartirons dans ??d?, au Krag, ? la Sesja Tawerna ou au Piwiarnia Warka.

Le pinceau des phares d?crit un arc de cercle, l’?claire au passage, puis la fresque. Il se l?ve, marche vers le taxi, s’installe ? l’arri?re. La voiture repart.

Il restait une derni?re chance ? Witold. Ne pas remettre dans sa poche son carnet de croquis. Le laisser sur cette petite table basse qu’il est all?e chercher dans l’Atelier K. Il aurait pu me laisser l?, derri?re lui, d?finitivement.

Demain ? l’aube, les artificiers trufferont les b?timents de la friche d’explosifs. Les bulldozers suivront, poussant le pass? de leur lame brillante. Une zone commerciale sera construite. Ou autre chose de nouveau.

Witold esp?rait-il que je sois l?, moi aussi, en p?lerinage avant que l’atelier K et notre fresque soient d?truits?? Esp?rait-il des pleurs et des baisers froids?? A-t-il esp?r? quelque chose?? Au loin les feux arri?res du taxi s’effacent alors que, du c?t? des acacias, la fauvette reprend ses trilles.

Gilles BERTIN

Photo?: Mathieu Neuville, avec son autorisation

La galerie de Mathieu sur Flickr?:?www.flickr.com/photos/labodeguita/with/5582151483

la liste des autres blogs participants ? ces Vases communicants de juillet.
http://rendezvousdesvases.blogspot.fr/2012/06/liste-juillet-2012.html

Les autres Vases communicants sont :

Textes?:?http://www.lignesdevie.com/2012/05/a

Fête d’école

P1040006Alain est orphelin. Il n’a plus de  mère; il est arrivé dans la classe avec des yeux bleus pleins d’eau. Il vient d’un autre village. Son père est facteur et, comme tous les facteurs, il a le visage trop rouge et, le soir, il descend de son vélo en tanguant un peu. Alain a une grande sœur qui s’occupe bien de lui, il a des habits propres. Il est assurément le plus beau de l’école et comme il n’a pas de mère, il est encore plus beau de mystère. Et personne dans la classe n’a des yeux bleus, tous ces petits Jurassiens croisés avec des Italiens et des Espagnols ont des yeux qui vont du noisette pas mûre au brun et même au noir charbon mais pas d’yeux bleus.

Mais d’où il vient cet orphelin?

Parfois, Alain a ses crises, il les appelle comme ça, il a peur, il a mal à la tête, il délire. Une fois, il était couché sur l’estrade et il criait qu’il voulait rentrer chez lui. Et il appelait sa mère. L’institutrice que pourtant rien ne démontait avait un drôle d’air. Elle lui a fait boire un verre d’eau, il avait vraiment sa crise.

Après adolescents, lui et moi, on s’était embrassés toute une soirée. J’avais  été surprise et très vexée, parce qu’il n’avait jamais recommencé et n’en avait pas reparlé. Lointain, il était retourné vers un drôle d’ailleurs, les yeux bleus si clairs.

J’ai su de loin en loin qu’il s’était marié deux fois, et deux fois avec des femmes qui lui en avaient fait baver. C’était l’expression, il était mal tombé, Il n’a pas eu de chance avec les femmes!

Et je l’ai revu et avec ma sœur, on lui a dit en riant: Tu es toujours le plus beau!

Et il a dit: ça ne m’a pas porté chance!

Et après, il est venu vers nous et il a parlé, la première fois depuis cinquante ans.

Il a dit qu’il avait vécu un enfer avec ses deux femmes, qu’il avait accepté l’inacceptable, qu’elle lui avait laissé trois enfants à charge et qu’il avait fait un travail sur lui et qu’il avait enfin compris pourquoi.

Ma sœur et moi en chœur?: Alors c’était quoi? Pourquoi?

Et la conversation s’est poursuivie dans une fête au milieu de soixante-dix personnes qui riaient, buvaient, se reconnaissaient, une fête d’anciens d’école entre surprises, nostalgie, rigolade. Alain racontait toute sa vie. J’avais des crises, et surtout, je vivais dans la terreur de ces crises, j’avais surtout peur d’elles, toute ma vie j’ai vécu dans la terreur!

Mais qu’est-ce que t’as compris?

C’est parce que ma mère était morte et on m’avait rien dit. On m’avait emmené chez des voisines; personne ne m’a parlé, expliqué, je suis parti à midi à l’école et le soir, elle avait disparu et on m’a tout caché,  on m’a laissé chez des voisines et on parlait comme si je n’étais pas là, on disait: il faut pas lui dire! Et j’entendais tout! Et comme ça s’était passé pendant l’école, j’avais peur de l’école.

Et comme ma mère m’avait abandonné, toute ma vie, j’ai eu peur d’être abandonné par les femmes et j’ai tout enduré pour les garder et elles le savaient et elles partaient quand-même.

Et le bruit montait dans la salle, l’apéro avait chauffé les esprits, blanc du Jura, Crémant et Alain était toujours entre ma sœur et moi, et il parlait:

J’avais un très bon boulot, j’étais directeur de production, et quand j’ai perdu mon emploi, et que j’ai dû m’occuper seul de mes enfants, j’étais au bout du bout et j’ai cherché à comprendre. Et J’ai rencontré une femme, elle est sophrologue et elle m’a envoyé chez un collègue à elle à Genève et il m’a fait parler de mes crises. Tu te rappelles de mes crises?

J’ai dit:

Oui, j’avais oublié mais je l’ai revu sur l’estrade, allongé, pâle et terrorisé qui appelait sa mère.

Oui, tes crises, je me rappelle, c’est vrai!

Et parfois, il quittait les soir?es en plein milieu, et je lui en voulais encore de m?avoir embrass?e et puis plus rien, ni bonjour ni au revoir, rien, ?oui, ?tes crises?!

Et soudain la question me vient, je ne la retiens pas, on aurait dit qu’elle m’attendait là depuis tout ce temps.

Mais elle est morte de quoi ta mère?

Mais c’est ça le problème, c’est pour ça qu’on m’a emmené chez les voisines et qu’on m’a rien dit! Que mon père était fou de douleur, c’était un avortement, un avortement raté, elle est morte à trente-cinq ans, un après-midi, au milieu du village dans sa chambre et je l’ai appris bien plus tard, des années plus tard.

Il est né en 53, c’était donc dans les années 60 65, une femme mourait et on cachait tout  à son fils.

Et t’as encore des crises?

Beaucoup moins, des migraines seulement et je vis avec la sophrologue, elle m’aide et je l’aide aussi, on parle.

On est allés boire avec les autres, on avait quelques verres de retard, mais la petite vérité toute tremblante était sortie et les beaux yeux bleus désormais nous voyaient.

 

 

Bénévole signifie qui veut bien ou les forçats volontaires et heureux du livre

DSCF7674Vendredi 12 juin de 10 à 18h, nous allons au Festival du Premier roman jeunesse à Bourg-en-Bresse. Nos collègues, enseignants de l’UFM, ou en collège et écoles primaires ont fait lire leurs élèves, leur ont fait sélectionner quatre textes, les amènent rencontrer les auteurs dans la grande cour vide du bâtiment de l’Ecole normale de Bourg-en Bresse. Elles ont transporté les livres, hébergé les auteurs, conduit et encadré leurs élèves, servi à boire, organisé une table ronde.
Vendredi soir, 18h 30, j’aurais dû faire une lecture chez mon amie Maud dans sa librairie-bouquinerie appelée Chez Jeanne à Saint-Claude. Maud vend des livres d’occasion, certains très vieux mais aussi des tablettes numériques, elle twite, elle connait bien son métier, elle essaye de gagner sa vie. Avant, elle était libraire ambulante, vous pouviez la rencontrer sur les routes du Haut-Jura, dans les écoles, les colonies de vacances, elle sort les cartons, rentre les cartons, parle de ce qu’elle aime et connaît le mieux. Ce soir-là, elle déclare forfait, on reporte la lecture, ce n’est pas grave, les livres ont le temps .
Samedi matin 6h 30, j’installe avec Bernard, les bouquinistes, dans la rue Mercière pour la première foire aux livres d’occasion. Maud est là, mais aussi Michel, Bruno, Françoise… Ils ont des bancs, des parasols, leurs pliants, leurs sandwichs pour midi. Toute la journée, ils écoutent, conseillent vendent, et courent voir chez le voisin s’il a un trésor. Les membres de l’association invitante remplissent des papiers, aident à porter des cartons, servent à boire, lisent timidement des textes de Pierre Soletti et Françoise Delorme dans des micros fatigués. Ceux du bout de la rue crient :  On n’entend rien !
Samedi soir 18h 30 Lecture à la cave littéraire de Villefontaine en compagnie de Geneviève Metge, Jean-Guy Angles et Daniel Cortot harpiste. Les bénévoles de l’association ont écrit et photocopié un billet, ils nous ont présentés, enregistrés, filmés, ils ont vendu nos livres et offert à boire et à manger.
Moi, j’ai trimballé des pliants, un micro et un ampli, monté  un stand, lu des poèmes, j’ai lu mes romans, signé, parlé et je repars dans la nuit avec un carton de livres sous le bras.

6 mai 2012

Hollande_bastille_12Vieux r?ves, grands espoirs, joie, soir?e entre amis, puis ?Place Bellecour, les jeunes de Lyon montaient sur le cheval et Louis XIV comme ceux de Paris sur la statue de la Bastille, ils klaxonnaient comme les soirs de victoire de l’OL, ?ils?n?avaient? pas les codes, ils apprendront, ?puis au Transbordeur, danses et discours, musiques et alcools.

On y ?croit, on respire mieux, on sourit ? son voisin, on se sent mieux dans sa peau.

MERCI ? tous ceux qui ont mouill? la chemise, distribu? des milliers de tracts, parl?, parl??longtemps, parl? parl? parl?….

Voyages

P1040903Quand je voyage comme maintenant, m?accompagnent des bouts de vers, morceaux de rimes, balades?; Dans mes pas, sur la route s??gr?nent les r?citations d?antan,

Les r?ves adolescents,

Ivres, l?-bas, les merveilleux nuages

Les ors baudelairiens,

vois sur ces canaux dormir ces vaisseaux,

Ils viennent du bout du monde,

les voiliers mallarm?ens

L?ve l?ancre, steamer,

Les bateaux ivres,

les voyelles en couleurs,

les transsib?riens, et les cloches de Moscou,

Le quatuor d?Alexandrie

L?immeuble Yaccoubain,

le vieux qui lisait des romans d?amour,

La petite fum?e et l?herbe du diable,

Le dessous du volcan,

La vagabonde,

Les Conqu?rants

, Isabelle Eberhart et Alexandra David Neil

Ella Maillard et P. E. Victor

Nicolas bouvier,

ils marchent avec moi,

nous allons du m?me pas tranquille et audacieux

qui m?ne toujours derri?re l?autre montagne,

Vois l?-bas, le sabla a fr?mi

Pars?! Pars?!

Pendant quelque temps, ce blog laisse place ? d?autres images, change de cap, s?attarde au r?cit de voyage, au concret des pays travers?s

Pour ceux qui aiment vous pouvez me retrouver avec ?mes compagnons d?aventure, Alain, Thibaut ?sur

http://marysev.blog.free.fr

Pour les autres, restez l?, je reviendrai de temps ? autre, je cherche un livre oubli? au fond de moi, dans les immensit?s australiennes, dans les mines d?or et d?opale, dans les villes anciennes, ?je cherche.

?

Saute-frontière a 10 ans

Chers amis
FAITES DES MOTS QUI DANSENT ce dimanche de 11h 30 à  17h
dans l’ancienne fruitière de Cinquétral dit « le CHALET »
autour de dix mots qui nous relient : COMPLICE, AGAPES, AVEC, ACCUEILLANT etc etc ….
Nous avons concocté  pour l’occasion – 10 ans ! – un joli petit programme
qui appelle votre participation pour les jeux oulipiens et le buffet !
En échange nous vous offrons des intermèdes poétiques et musicaux
concoctés par :
les poètes présents : Jacques MOULIN, Maryse VUILLERMET , Alexandre FRIEDERICH,
les comédiens : Muriel RACINE et Daniel VOUILLAMOZ,
les gagnants du concours des dix mots
Jean BOLCATO à  la contrebasse et Françoise MONNERET dans ses jeux vocaux

sans oublier notre extraordinaire inventeur de l’ENCYCLOPEDIE MUTANTE,

Pascal NORDMANN

 

Alors, nous ferez-vous l’honneur et le plaisir d’être des nôtres ?
on l’espère et on vous attend pour faire la fête !
une petite réponse de votre part par retour de mail nous encouragerait !
fraternellement
Marion CIREFICE
Charg?e de projet

SAUTE- FRONTIERE
Maison de la po?sie transjurassienne
17 grande rue CINQUETRAL
39200 SAINT-CLAUDE
tel : 03 84 45 18 47
marion.cirefice@sautefrontiere.fr
www.sautefrontiere.fr
DImanche 11 D?cembre
FAITES DES MOTS QUI DANSENT
? Cinqu?tral ? partir de 11h30
10 ANS DE SAUTE-FRONTIERE

Square George et Adèle Besson ou le mystère de la mémoire

automne2011 136Quand c’est toute une ville qui se souvient; George Besson, collectionneur, critique d’art, éditeur, photographe, oublié pendant quarante ans, se retrouve dans les mémoires des habitants en même temps, au même moment.

Valérie Pujin, conservatrice du musée de l’Abbaye, après des mois de négociations et d’efforts, arrive à  rassembler les plus tableaux de la collection et à  nous offrir une exposition magnifique du 28 octobre 2011 au 12 février 2012.

Le maire, Francis Lahaut, baptise le square face au musée, face à  la cathédrale, un des meilleurs emplacements de la ville, square George et Adèle Besson .

J’écris depuis 2009 une biographie, elle va paraître chez Cabedita, au printemps.

Un très beau livre de Chantal Duverget sur l’ensemble de la collection paraîtra bientôt. Et soyons-lui reconnaissants, elle -seule, en le choisissant comme sujet de thèse, lui avait rendu hommage.

Une ville toute entière a cessé d’oublier.

Ouvriers dans les gares

xian 098Dans la Gare de? Hefei en plein milieu de la Chine, apr?s d?j? 20 heures ?de train depuis Xian pour aller ? Suzou, nous sommes rest?s quatre ?? cinq heures, ???assis ?par terre ou sur nos valises. Nous ?tions dans des couloirs form?s par des barri?res, au bout du couloir, ?sur le plafond, ?s?affichait l?heure du train qui reculait avec la nuit, 11h, 12h, 1h du matin, la nuit avan?ait, la pluie claquait sur le toit, les lumi?res de la gare blafardes usaient les yeux.

La foule compacte de travailleurs chinois, je dis  » travailleurs « parce que ?leur allure, leurs v?tements, leurs chaussures, leur bouche o? il manquait des dents parfois, leur visage tann?, et surtout, leur d?marche un peu gauche, ? en ?taient le signe

J’ai suppos? qu’ils rentraient chez eux ?pour une semaine de vacances.? Tous, ?ils transportaient des sacs immenses en plastique, des ventilateurs ou de petits appareils ?lectrom?nagers neufs, des grands cartons renforc?s par des ficelles. Par groupe d’hommes, ?trois ou quatre hommes, assez jeunes la plupart du temps, quelques femmes sans enfants, ? la fois f?briles et fatigu?s, ils allaient et venaient. J’imaginais l’impatience et la joie d’arriver au village, dans la famille, ?de serrer femme, ?enfants, parents tr?s ?g?s dans ses bras, ?de distribuer les cadeaux, des babioles pour les enfants, un joli v?tement pour la femme, peut-?tre un ventilateur, une cafeti?re ?lectrique, une mini t?l?vision, des biens inestimables gagn?s sur les chantiers la nuit et le jour. Beaucoup ?puis?s ?taient couch?s par terre la t?te sur un carton ou un sac. D’autres allaient remplir d’eau chaude leur bo?te de p?tes toutes pr?tes.?? Nous avions d?couvert pendant notre voyage ces boites tr?s pratiques de? nouilles lyophilis?es, peu de go?t, bien consistantes, sur le dessus de la boite,? des baguettes en plastique ?taient coll?es et permettaient de manger instantan?ment.

Ils nous regardaient longtemps, parfois, ?ils s?approchaient en groupes pour se donner du courage et entouraient? Gr?goire, et Thibaut, les deux ados qui nous accompagnaient. Ils touchaient ?Gr?goire, le petit blond, ils caressaient sa peau, ses cheveux, jamais s?rement, ils n?avaient vu un enfant blond, ils s?amusaient de sa petite valise, ?de son petit sac ? dos. Nous ?tions leur distraction, leur repos. Mais bien vite, ils retournaient ? leur place, t?chaient de dormir, sortaient un jeu de cartes ou un journal, s?endormaient sur la page ouverte.

Plus tard, quand le train arriverait, ce serait la course pour trouver une place, un bout de banquette et un ?morceau de tablette pour poser sa t?te et dormir encore dix heures, plus, ?jusqu?? une autre gare, se d?p?cher de? ?dormir pour r?parer le corps, pour faire passer le temps du voyage, ?et peut-?tre dans un ou deux jours, ?l?arriv?e.

Et j?avais toujours ?en t?te la gravure que l?amie m?avait offerte, les Italiens ? la gare Saint-Lazare. La foule, les v?tements sans couleurs, les balluchons, les corps ploy?s, la grande verri?re et sa lumi?re blafarde, toujours la m?me histoire, toujours les? paysans qui vont vers le travail ?et j?avais en t?te le r?cit de l?arriv?e ?d?Italie de ma grand-m?re avec ses huit enfants? serr?s autour d?elle, sa valise,? son portefeuille avec le pr?cieux papier, la derni?re lettre du grand-p?re que j?ai gard?e o? il disait ?? peu pr?s ces mots,? que j?ai fait traduire cet ?t??:

??Je ne saurais pas quoi te dire de mon retard ? te donner de mes nouvelles, mais vu que je savais que dans une semaine , j?aurais re?u un feuillet que tu trouveras li? au pr?sent?; le papier pour te faire tes papiers pour que tu puisses partir enfin toi aussi.? Maintenant il sera ton tour de te presser de faire ce que tu peux et je te recommande de ne donner ? personne ce feuillet. Tu le montreras au secr?taire de mairie qu?il te fasse la demande de passeport et puis tu le pr?senteras ? la douane? xian 098xian 102J?ai fait toute la semaine les foins et ce matin, le vent du Nord? Comme je veux esp?rer que tu puisses partir, fais vite, tu m?aideras ? finir les foins, tu comprendras que si je dois faire le terrain tout seul, le travail devient dur?. Rappelle-toi, tu ne donneras pas la carte ? personne et rien de plus.??